Abel Leblanc, figure remarquable de Roubaix, ne fêtera pas ses cent ans en novembre prochain. Peintre, poète, chansonnier, le vieil homme laisse une œuvre picturale remarquable, véritable hymne à la beauté et à la joie de vivre. Les tableaux d’Abel Leblanc renouent les liens entre l’homme et cette valeur essentielle qu’est la vie.
C’est donc est une triste nouvelle qui vient de tomber : Abel Leblanc, peintre roubaisien, est mort. En novembre prochain, nombreux étaient ceux qui se préparaient à fêter son centième anniversaire. C’était une fête de trop. Le destin a décidé d’enlever Abel Leblanc, ce 11 août 2019.
La peinture d’Abel Leblanc est une peinture de l’émerveillement : foisonnante, joyeuse, colorée, dynamique. L’œuvre d’Abel Leblanc est à l’image de ce que fut son créateur : une peinture qui aime la vie, une peinture chantante et rieuse.
Abel Leblanc n’était pas le peintre de la standardisation des goûts et de la production industrielle. S’il a beaucoup peint, il n’a jamais décliné un thème, une trouvaille picturale en des dizaines de toiles. Abel Leblanc, peintre de chevalet en pleine nature, dévorait son environnement des yeux et s’imbibait de l’émotion de la beauté du monde pour traduire cela sur la surface plane d’une toile de lin.
Il suffit de se rendre sur le site consacré à Abel Leblanc pour être fasciné par la diversité de ses œuvres : figuratives ou à la limite de l’abstrait (Estuaire de la Canche), impressionnistes, un brin classiques ou furieusement modernes dans l’interprétation de ce qui s’offre à voir au regard (Lumière en forêt, Fréquence Nord, paysages urbains de Lille).
Venise n’a jamais été peinte de façon aussi subtile et poétique. Rien de mièvre et de décoratif dans ces toiles vénitiennes mais un regard qui rend la noblesse et la grandeur des lieux.
Les paysages de l’Ource impressionnent par la diversité de la palette du peintre, paysages aux multiples couleurs et aux éclats de lumière presque oniriques.
Les fleurs, le monde végétal sont exubérants et légers. A leur vision, une forme de quiétude et d’apaisement gagne l’observateur. La nature semble tisser pour la Terre une robe printanière qui lui donne un côté jeune, sensuel et séducteur. La contemplation des jardins peints par Abel Leblanc fait naître une forme de bienheureuse nostalgie, si bien rendue dans le film « Un dimanche à la campagne » de Bertrand Tavernier.
Abel Leblanc ne faisait pas partie du Groupe de Roubaix même s’il a approché ses membres. Abel Leblanc, poète, chansonnier, peintre était sans doute le dernier héritier de ces peintres du plaisir, de la gouaille et de la joie de vivre.
La joie de vivre se voilerait de noir et de tristesse si les toiles d’Abel Leblanc ne venaient pas déchirer l’édredon étouffant de la fin des choses et du malheur. La joie de vivre serait en berne si nous ne savions pas qu’Abel Leblanc a rejoint Gisèle, l’amour de sa vie.
Dans quelques temps, il sera nécessaire de réévaluer l’œuvre pétillante de jeunesse d’Abel Leblanc. Roubaix a des raisons d’être une ville fière car elle a eu en son sein tant de peintres de talent.
Aujourd’hui, la ville perd une de ses étoiles. Aujourd’hui nos pensées vont à ses enfants et petits- enfants. Une page de leur histoire familiale se tourne. Demain, nous aurons toujours le regard émerveillé par Abel Leblanc en contemplant ses tableaux. Merci Abel Leblanc pour ce legs que vous laissez aux amateurs d’art et à celles et ceux qui s’émerveillent d’un rayon de soleil, d’une fleur ou d’un simple reflet sur l’eau.
Les obsèques d’Abel Leblanc ont eu lieu le 16 août 2019 à 14 h 30, en l’église Notre-Dame-de-Lourdes, rue de l’Avenir, à Roubaix (Nord). Ses cendres reposent au cimetière de Loches-sur-Ource auprès de son épouse, Gisèle.
Fred Lecoeur