La poésie conduit parfois dans les geôles des Etats totalitaires. De sombres espaces où les principes, les noms et les visages s’estompent et perdent sens et presque réalité. En 1970, Mirko Vidovic, Ecrivain croate naturalisé français, a publié Le Temple de l’Espoir, recueil de poésies, couronné en 1971 d’un prix littéraire décerné par la Revue croate.
Peu de temps après cette publication, Mirko Vidovic s’est rendu au chevet de sa mère malade en Croatie. Voyage fatal dans un pays où la poésie était considérée comme dangereuse. Le poète fut condamné à quatre ans de prison pour avoir rédigé ce recueil. Mirko Vidovic fut interné dans le camp de travail de Stara-Gradiska. Le lieu est de sinistre réputation. La liberté y était considérée comme une provocation, la liberté de pensée comme une abomination. Stara-Gradiska était l’une des sombres geôles de Tito, grand fumeur de cigares. Les volutes de fumée de Tito asphyxiaient dans leurs tournoiements les espoirs des hommes épris de liberté.
Mirko Vidovic fumait aussi mais des cigarettes. Du fond de son cachot, Mirko Vidovic a continué à écrire de la poésie. On ne lui a pas fourni de beaux cahiers, il a dû se débrouiller avec ce que ses geôliers laissaient à portée de main. Mirko Vidovic a rédigé ses poèmes sur du papier à cigarettes. Son épouse emportait ces précieux et fragiles manuscrits, cachés dans ses bas, chaque fois qu’elle revenait d’une visite à son mari. Les volutes de fumée de Mirko Vidovic fissuraient, dans leurs tournoiements, les murs et les barreaux de sa prison. Ces poèmes de captivité constituent le recueil Chevalier Blanc (Chants de Captivité). Ce recueil sera prochainement publié, et pour la première fois en France, par les Editions SansQu’ilSoitBesoin.
Le poète restera cinq ans et deux mois dans les prisons yougoslaves avant de retrouver sa liberté. De retour en France, il continuera son œuvre d’écrivain, de poète, de philosophe et d’homme politique. Il a rejoint le Conseil National Croate, il a présidé la Diète (1980) et a livré des témoignages accablants sur le Goulag yougoslave. Il participa à la rédaction de l’acte final de la Conférence d’Helsinki et à la fondation de la Fédération Helsinki pour les Droits de l’Homme. Sur son emprisonnement, il publiera en 1983 La face cachée de la Lune ou Cinq ans dans les prisons de Tito.
Mirko Vidovic est né le 31 décembre 1940 à Bila (Livno) alors en Croatie, aujourd’hui en Bosnie. Inlassable partisan et militant de l’indépendance de la Croatie, il fut l’un des principaux avocats de la Croatie libre. Il est mort le 13 octobre 2016 à Valence, en France. Il aurait publié de son vivant près de 1 300 travaux dont 110 auraient été traduits dans diverses langues étrangères. Toutefois, très peu d’ouvrages ont été publiés en langue française. Une quarantaine de manuscrits inédits (pièces de théâtre, ouvrages de philosophie etc…) ont été remis, avant son décès, à des autorités religieuses bosniaques.
La publication, pour la première fois en France, de Chevalier Blanc (Chants de captivité) est assurément un évènement pour tous ceux qui aiment la poésie et pour tous ceux qui restent et resteront à jamais épris de la liberté.
Dans l’attente de cette prochaine publication aux Editions SansQu’ilSoitBesoin, nous offrons aux lecteurs de ce site, un poème extrait de Chevalier Blanc (Chants de captivité) :