Politique, Réflexion

La Samaritaine et le mécénat actif de M. Bernard Arnault

Le groupe LVMH et sont fondateur, M. Bernard Arnault, se singularisent par leur mécénat. Dans quelques semaines, un lieu emblématique de Paris, La Samaritaine, devrait de nouveau être accessible. La restauration/transformation de ce lieu a été une aubaine pour des métiers d’art et des artisans talentueux. Au final, l’aubaine est pour nous tous.

Deux admirables chantiers sont donc en cours à Paris. Ils ne sont pas les seuls, mais leur ampleur et leurs caractéristiques sont atypiques. Il y a la restauration/transformation de la bourse de commerce et la restauration/transformation de la Samaritaine. Dans les deux cas, ces travaux sont à l’initiative de deux des plus grandes fortunes de France et ces travaux représentent des coûts d’investissement que les collectivités publiques ne peuvent guère assumer aujourd’hui.

En cette période extrêmement anxiogène, il n’est pas inutile de constater que des milliardaires peuvent avoir des projets qui dépassent, et de leur loin, leur intérêt et horizon personnels. Les deux chantiers, au final, sont destinés à léguer aux générations futures des lieux emblématiques de la culture.

Pour beaucoup de Parisiens, la fermeture de la Samaritaine  aura été un choc. « On trouve de tout à la Samaritaine » clamait la publicité et le slogan était vrai : on trouvait de tout et même ce que l’on ne cherchait pas en ce lieu aux étages multiples, aux parquets parfois grinçants, au sol par endroit étrangement souple et aux superbes escaliers métalliques qui conduisaient le visiteur au plus près de la verrière Art nouveau. Pour ma part, j’avais aussi une affection particulière pour les vendeuses. N’y voyez pas une forme larvée de lubricité, ce n’est pas ça. Il y avait de l’Arletty en elles. De la gouaille, de la présence, du dynamisme mais aussi de la nonchalance plus ou moins feinte. Elles savaient remuer le client hésitant et ne se laissaient pas impressionner par certaines formes d’arrogance. L’ensemble était typiquement parisien ou du moins très proche de l’image que l’on pouvait se faire de la Capitale. C’était une autre atmosphère, avant la « boboisation » de la ville.

Un jour tout a fermé. Un fragment important de la vie parisienne a sombré dans la Seine toute proche. Les Parisiens se sont sentis amputés d’un lieu qui leur était proche.

Le lieu a fermé pour trouver sa nouvelle vocation. Cela a pris du temps. Les contraintes du code de l’urbanisme ont joué leur rôle. Quinze années se sont écoulées depuis la fermeture de ce temple de la grande consommation. La Samaritaine n’est toutefois pas tombée entre de mauvaises mains. Loin de là. Leur nouveau propriétaire, le groupe LVMH et derrière ce groupe, M. Bernard Arnault, n’ont pas vacillé, renoncé et préféré se jeter sur des investissements de court terme plus lucratifs. C’est la chance de la Samaritaine et c’est la chance de notre pays. Etre milliardaire n’est pas une injure. Ce qui est injurieux, c’est le mauvais usage qui peut-être fait d’une fortune immense qui repose immanquablement sur le travail de milliers d’hommes et de femmes. Le groupe LVMH, et son président directeur général, se montrent sur ce point exemplaires d’un usage utile de cette fortune.

Cette exemplarité s’est révélée avec le drame de Notre-Dame. Tout récemment, le groupe LVMH a cessé la production d’une partie de ses produits de luxe pour fabriquer du gel hydroalcoolique dont la distribution aux personnels de santé se fera sans contrepartie financière. Enfin, cette exemplarité, pour ne retenir que trois exemples, se manifeste avec la résurrection de la Samaritaine.

Le magazine Connaissance des Arts, propriété de LVMH et propriété clairement affirmée, a décidé de donner libre accès à la version numérique de son numéro du mois d’avril 2020. Ce numéro fait le point sur le chantier de la Samaritaine. Le site internet du magazine donne accès à de courtes vidéos relatives  au travail des

Art nouveau

architectes, des restaurateurs, des techniciens et notamment d’une spécialiste, Maria Da Costa, émailleuse sur lave. Je vous invite à regarder ces vidéos et particulièrement celle dévoilant le travail de Mme Da Costa. Cette vidéo montre comment sont réalisées des plaques de lave émaillées. C’est beau, émouvant et passionnant. L’artiste indique très clairement que ce chantier sera sans doute le seul de cette envergure dans sa carrière professionnelle. Ce qui est beau dans ces vidéos, c’est de voir des individus passionnés par leur travail et soucieux du travail bien fait. La passion et le talent sont deux facteurs de réussite indéniable. Voir ces personnes si pleinement investies dans leur métier donne un coup de fouet. Il y a quelque chose d’exaltant à croiser des personnes qui donnent sens à leur vie professionnelle. Leur élan est communicatif. En ces heures anxiogènes, regarder leur travail est stimulant.

Il paraît normal et honnête de saluer l’action de M. Arnault. Cette action permet à des métiers rares d’exister et de se maintenir. Il ne s’agit pas seulement de procurer des revenus aux architectes, artistes et artisans mais de conserver des savoirs faire par la pratique et forcément par la transmission. Il y a quelques années un spécialiste du château de Versailles regrettait que, de nos jours, on ne savait plus refaire, avec les mêmes gestes, les décorations de plomb des toitures du château. Il ne faut pas continuer à perdre des savoirs, des gestes fruits de recherches et de longues pratiques. Une telle perte rendrait impossible la restauration de fresques, de plaques de lave émaillées etc…

Pour conclure, la Samaritaine devrait rouvrir en Avril 2020.  Espérons que la pandémie actuelle sera jugulée d’ici là et que le nombre de morts sera en décroissance. Je me veux optimiste et j’espère être là en avril 2020 pour de nouveau entrer dans ce bâtiment que hantent tant de souvenirs de ma jeunesse.

Fred Lecoeur